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L’ornementation genevoise

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Carl Magnusson, historien de l’art et maître-assistant à l’Université de Lausanne, spécialiste de l’ornemen-tation, propose une thèse sur les éléments de décoration intérieure du sculpteur genevois Jean Jaquet (1754-1839). Au-delà de l’aspect décoratif, c’est la dynamique sociale entourant ces ornementations que le chercheur a voulu mettre en perspective. Le travail du chercheur lausannois a déjà fait l’objet d’un article dans notre revue au printemps 2008. Il s’était penché  sur le corpus des œuvres de Jaquet. La documentation des œuvres au sujet du sculpteur étant rare, il avait alors dû se livrer à des exercices d’attribution. Depuis, Carl Magnusson a élargi son spectre d’approche et de questionnement. Comment expliquer, malgré les nombreuses œuvres présentes à Genève, que l’historiographie genevoise ne retienne que peu d’autres noms ? Quels éléments historiques sont à disposition  pour nous aider à mieux appréhender les subtilités gravitant autour du personnage et de ses œuvres ?

Carl Magnusson
Jean Jaquet et ses émules obscurs : les sculpteurs d’ornement à Genève au XVIIIe siècle

Jury :
Christian Michel (directeur)
Peter Fuhring
Pascal Griener
Georg Germann

Travailler sur la décoration intérieure au XVIIIe siècle revient à s’intéresser à un corps de métier qui n’a guère retenu l’attention des historiens : les sculpteurs d’ornement. A Genève, un seul représentant de cette spécialité est passé à la postérité : Jean Jaquet. L’activité de celui-ci couvre les dernières décennies du XVIIIe et les premières années du XIXe siècle. Comment Jaquet, ce simple entrepreneur en décoration, est-il parvenu à acquérir une forme de notoriété et s’est-il fait une place dans l’histoire de l’art genevoise ? En quoi son parcours professionnel se distingue-t-il de celui des autres sculpteurs d’ornement actifs à Genève au XVIIIe siècle, de ses émules obscurs ?

Afin de traiter ces questions de manière critique, il a d’abord fallu étudier l’arrière-plan socio-professionnel de Jaquet. Un important travail de dépouillement de sources – notamment les registres des permissions de séjour accordées par la Chambre des Etrangers de Genève – a permis de comprendre les rouages de l’entreprise de décoration, l’activité et la succession dans le temps des différents ateliers. L’étude de la production reste néanmoins problématique. Le corpus de décorations conservées du XVIIIe siècle est en effet mal identifié et l’absence de documentation historique rend toute tentative de classement par ateliers ou par périodes délicate. Le caractère parcellaire de l’information m’a conduit à renoncer à présenter une vision globale de la décoration intérieure à Genève au XVIIIe siècle et à proposer une nouvelle carte des attributions. La deuxième partie de la thèse suit par conséquent un principe simple. Partant de l’omniprésence de Jaquet dans l’historiographie, elle analyse la manière dont le corpus de ses œuvres a été constitué au fil des XIXe et XXe siècles. En d’autres termes, elle vise à déconstruire les mécanismes de l’attribution et à interroger la pertinence des critères sur lesquels elle se fonde. Une telle démarche permet de redessiner les contours de la production de décoration à Genève. En effet, elle révèle que certains ensembles attribués à Jaquet sont vraisemblablement l’œuvre d’autres entrepreneurs. Elle permet aussi de saisir les enjeux de la production des sculpteurs d’ornement. Celle-ci ne doit pas être entendue comme l’expression de personnalités artistiques autonomes. Les différents ateliers ne cherchent pas à créer une manière, un style qui leur serait propre. Leur œuvre est avant tout déterminé par une demande sociale stéréotypée et des modèles convenus qu’il s’agit de reproduire.

La troisième partie de la thèse analyse, du XIXe au XXIe siècle, les modalités de la promotion et de la réception de Jaquet, en d’autres termes la construction de son image. Grâce à son ambition, le sculpteur s’est hissé au-dessus de sa condition. Parmi les entrepreneurs en décoration actifs à Genève, il est en effet le seul à avoir séjourné à l’étranger, fréquenté les académies, enseigné le dessin et fait quelques incursions dans le domaine de la sculpture figuriste. Par conséquent, il est aussi le seul à trouver une place dans l’histoire des Beaux-Arts à Genève, puis, à partir de la fin du XIXe siècle, dans celle des Arts décoratifs. Ni artiste de talent universel, ni ouvrier, Jaquet est un représentant de première qualité d’une catégorie professionnelle particulière, composée d’individus situés à la charnière des arts mécaniques et des arts libéraux, qui n’ont, de ce fait, bénéficié que d’un intérêt marginal.

Fig. 1. Jean Jaquet (attr.), le grand salon des Délices, vers 1783 ?, photo de l’auteur.


Fig. 2. Jean Jaquet (attr.), un dessus de porte du grand salon des Délices, vers 1783 ?, photo e l’auteur.


Fig. 3. Jean Jaquet, le grand salon du château de Cartigny, 1802-1803, avant son remontage au Musée d’art et d’histoire de Genève, photo Boissonnas.


Fig. 4. Jean Jaquet, un dessus de porte du grand salon du château de Cartigny, 1802-1803, avant son remontage au Musée d’art et d’histoire de Genève, photo Boissonnas.

 


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© IMV Genève | 25.09.2012