La revue électronique de l'Institut et Musée Voltaire
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  SOMMAIRE   Candide pour iPad
par Flávio Borda d’Água et François Jacob
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Candide pour iPad


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Après la très belle édition de poche de Candide ou l’optimisme aux éditions Folio agrémentée des illustrations de Quentin Blake, nous avons le plaisir de vous proposer un Candide, édition enrichie pour iPad et iPod présenté au Forum d’Avignon le 16 novembre 2012.

Ce projet a été élaboré en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France, la Voltaire Foundation d’Oxford et l’opérateur téléphonique Orange. Partenariat qui remet au goût du jour le texte de Voltaire. Ou qui, du moins, tente de le rendre accessible à un public fervent de nouvelles technologies. Il est en ce sens réellement dommage que le Candide, édition enrichie ne le soit pas plus avec le concours d’autres partenaires tels que la New York Public Library – qui possède un grand fond sur Candide et qui lui a même consacré une exposition ces dernières années.

On peut de même regretter que l’application ne soit actuellement disponible que sur des supports Apple : n’était-il pas possible d’imaginer un e-book plus léger qui pût également s’adapter à Androïd ? Elle est en tout cas divisée en trois volets : le  livre, le monde et le jardin.

Prenons, tout d’abord, le livre. Cette partie présente l’ensemble du texte imprimé de Candide accompagné d’une lecture, que l’on peut facilement activer, réalisée par Denis Podalydès. Tous les amoureux du dix-huitième siècle se souviennent que Denis Podalydès avait déjà enregistré, le tricentenaire aidant, l’intégralité des Rêveries du promeneur solitaire de Jean-Jacques Rousseau. Le texte de Voltaire est ici enrichi d’explications lexicales, d’images du manuscrit ainsi que d’un cahier iconographique disponible tout au long de la lecture. Cette dernière, qu’elle se pratique visuellement (avec le texte) ou auditivement (par la lecture enregistrée) prend une dimension supplémentaire grâce à la valeur ajoutée du manuscrit : celui-ci, présent d’abord en marge du texte, peut d’un simple coup de doigt apparaître en face de l’imprimé. Les utilisateurs familiarisés avec l’écriture du XVIIIe siècle peuvent ainsi lire le texte sur l’original. Il se peut que les sauts de page ne correspondent pas entre ebook et document de l’époque : mais l’utilisateur lambda attend-il une édition diplomatique de cet ouvrage ?

Vient ensuite la partie consacrée au monde. Elle permet au navigateur de parcourir les diverses étapes du héros principal sur une carte interactive. L’utilisateur peut ainsi lire, ou écouter, le texte de Candide à chacune des étapes du voyage. Le plus intéressant dans cette section, ce sont sans doute les approfondissements qui sont proposés d’une manière thématique et d’après une description nourrie « de parcours pédagogiques, albums iconographiques, anthologie littéraire et interviews de personnalités ». Mais Georges Vigarello, Martine Reid et Michel Le Bris sont en fait les seules personnalités qui interviennent. On eût aimé entendre de vrais spécialistes de Voltaire : où sont donc Christiane Mervaud, Olivier Ferret, André Magnan, Christophe Paillard, Sylvain Menant, Ulla Kölving ? Et où sont les voltairiens de la nouvelle génération ? N’aurait-il pas été intéressant de s’entourer pour cette application de jeunes gens talentueux et doublement compétents par leur maîtrise de l’outil informatique et leur savoir sur Voltaire ?

La dernière partie de cette application est intitulée le jardin. Il s’agit d’un arbre interactif autour de quatre thématiques : le corps, l’argent dans Candide, le bon sauvage et l’ironie. C’est cette partie qui est destinée à devenir le volet pédagogique annoncé dans le projet. Elle n’est cependant pas encore tout à fait opérationnelle et doit regrouper à l’avenir les favoris que le lecteur aura sélectionnés pendant tout le temps de sa navigation par un simple clic sur une étoile.

On le comprend : ce projet pèche par précipitation. Qui est d’abord le public visé ? S’agit-il des enseignants du secondaire ? Si oui, le volet pédagogique, loin d’être mis en valeur, est quelque peu étroit et témoigne d’une assez grande méconnaissance des besoins des enseignants actuels. S’agit-il d’un public élargi, non nécessairement connaisseur de Voltaire ? Il est peu probable qu’un tel public s’y retrouve, ne possédant sans doute pas les « fondamentaux » nécessaires sur le XVIIIe siècle, indispensables à une bonne navigation. S’agit-il de jeunes lycéens ou d’étudiants de lettres ? On serait tenté de le croire, tant est affirmé l’aspect ludique d’une présentation dont l’interactivité est, finalement, le seul fonds de commerce.  

Mais c’est sur le plan scientifique que l’on est en droit de s’avérer déçu. Et ce pour deux raisons.

D’abord, les éditeurs de ce programme misent sur l’interactivité, mais oublient de mettre en rapport le texte de Candide avec le reste de l’œuvre de Voltaire, pourtant indispensable à la compréhension du texte. Ensuite, un rapport à notre siècle aurait été souhaitable : pourquoi ne pas avoir profité des différentes formes de réalité augmentée proposées dans l’application pour présenter un extrait du film de Norbert Carbonnaux (Candide relu à la lumière de la guerre d’Algérie, avec notamment Michel Simon) ou une scène de l’opéra de Bernstein (laquelle permettrait un intéressant questionnement sur l’opportunité d’un travestissement du conte voltairien en comédie musicale) ? Autant d’occasions manquées.

Dommage.



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© IMV Genève | 06.03.2013