La revue électronique de l'Institut et Musée Voltaire
ISSN 1660-7643
       
         
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par Jean-David Sandoz

    
       

 

     
 

 

Une vision habituelle des années du siècle passé est celle de ces personnes dans le train, au café ou sur un banc, parcourant un grand journal ou naviguant, rêveurs, sur les lignes d'un roman. Depuis déjà quelque temps, la métamorphose s'opère vers des regards rivés sur des écrans, leurs utilisateurs vaquant à des tâches mystérieuses qui absorbent temps et attention. « Ces gens ne lisent plus, ils pianotent sur leurs jouets technologiques » me direz-vous ? Et pourtant, nombre d'entre eux sont très certainement en pleine lecture, assidus et concentrés sur un outil en bien des points comparable aux lourds volumes qui occupent les rayons de nos bibliothèques.

Tablettes, liseuses et jusqu'aux smartphones nous offrent diverses fonctionnalités intégrant très généralement des applications qui permettent la consultation de livres numériques. C'est de ces dispositifs, regroupés sous la dénomination de livres électroniques, qu'il sera rapidement question ici. Nous présenterons les nouvelles possibilités offertes par ces technologies, leurs avantages et leurs inconvénients mais surtout les questions qu'elles suscitent.

Le livre électronique, ou encore ebook ou elivre,  sont des termes utilisés avec une grande liberté pour désigner tout dispositif permettant la lecture d’un livre numérique. Il faut néanmoins noter que la majorité de ces appareils ont une vocation bien plus large que la seule consultation de textes.

Parmi eux, on retrouve le plus souvent la tablette, laquelle offre un très large panel de fonctionnalités, se rapproche beaucoup de l'ordinateur et tend même à le concurrencer. La lecture sur ces appareils offre de nombreuses possibilités notamment au niveau des annotations ; un accès à Internet permet de profiter de liens hypertextes et des étagères virtuelles organisent la bibliothèque numérique. Néanmoins, le confort de lecture est souvent jugé très inférieur à celui du livre en raison du rayonnement dégagé par l’écran. Une lecture prolongée risque donc de causer une fatigue visuelle. Un autre défaut est la courte durée de vie de la batterie, qui ne dépasse généralement pas quelques jours et limite ainsi grandement l’autonomie de son utilisateur. L’équivalent miniature de la tablette en termes de lecture numérique reste le smartphone dont le principal avantage est d’accompagner son propriétaire en tout temps. La taille de l’écran est néanmoins un obstacle majeur. Malgré cela, il s’agit d'un des dispositifs les plus utilisés aujourd’hui pour la lecture numérique.

Il existe pourtant un type d’appareil exclusivement consacré à la lecture numérique : la liseuse. Celle-ci utilise une technologie d’encre électronique qui ne dégage aucun rayonnement. De plus, la batterie n’est sollicitée que lors du changement de page, ce qui permet d’utiliser cet appareil durant près d’un mois sans nécessiter de recharge. L’inconvénient majeur reste l’ergonomie. L’écran est noir et blanc, bien que des modèles couleur soient en développement, et la navigation n’est pas très fluide en comparaison de ses concurrents multifonctions. Le but de ce dispositif reste néanmoins d’offrir une expérience de lecture au plus proche de celle qu’offre le papier et le résultat a déjà convaincu bien des utilisateurs.

D’une manière générale, toutes ces solutions offrent de nombreux avantages : le principal est incontestablement de pouvoir transporter plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de livres dans sa poche. Il est également possible de personnaliser sa lecture en modifiant la police ou la taille des caractères, une fonctionnalité particulièrement appréciée par les personnes mal voyantes.

Un obstacle de taille s’inscrit néanmoins dans l’usage du livre numérique. Celui-ci n’est pas directement causé par son support, mais par le marché qui l’exploite. Une véritable guerre de formats entrave la liberté d’utilisation et empêche les lecteurs de jouir pleinement des différentes librairies numériques concurrentes. Par formats, n’entendez pas nos bons vieux in-4° ou in-8° mais des formats numériques qui conduisent à des incompatibilités entre appareils de lecture. Effectivement, un combat sans merci se livre entre les éditeurs ou entre les librairies, dont les tendances diffèrent. Un marché propriétaire en quête de monopole détient une grande partie des parts. Il est généralement incarné par le géant Amazon. De l’autre côté, des petits éditeurs s’échinent à proposer un catalogue aussi large que possible, en utilisant des formats ouverts et libérés de DRM*. Cette opposition entre multinationales et petits libraires est finalement ancienne et se retrouve également dans le marché de l’imprimé. Le lecteur, pris entre deux feux avec des options bien souvent complexes, est alors perdu et se voit déçu par des contraintes ou des limites décourageantes.

Il est néanmoins un domaine qui échappe au moins partiellement à cette guerre car né libre et offert au monde dans un but de partage. Il s’agit des livres numériques d’œuvres du domaine public dont l’usage n’est plus limité par des droits commerciaux. Il ne reste alors plus qu'à prendre garde aux divergences de formats entre appareils. Ce type de ressources offre un catalogue très vaste et entièrement gratuit d’œuvres numérisées. Le résultat est librement disponible sur bon nombre de sites. L’initiateur de ce mouvement, Michael Hart, débuta en 1971 en recopiant sur un ordinateur de l’Université la Déclaration d’indépendance Américaine. Aujourd’hui, 40 ans après, ce sont plus de 42'000 œuvres libres qui sont proposées sur son répertoire en ligne nommé Gutenberg Project. D’autres sites participent à la diffusion et à la numérisation de ces œuvres, dont ebooks libres et gratuits qui propose un contenu exclusivement francophone et de qualité, Feedbooks, une librairie offrant une section d’œuvres gratuites dont beaucoup sont tirées du domaine public, ainsi que Wikisource dont la base est alimentée et corrigée par les internautes eux-mêmes.

Certaines difficultés techniques dans l’utilisation du livre numérique n'en persistent pas moins. Pour les limiter au mieux, quelques bonnes pratiques peuvent être définies, notamment en réaction aux problèmes d’incompatibilités entre appareils. Le format EPUB s’impose en règle général comme un standard utilisé par tous, excepté Amazon qui favorise ses propres formats, précédemment le MOBI et plus récemment le AZW. Tous ces formats ont été spécialement conçus pour le livre numérique et offrent une structure adaptée à sa consultation. La conclusion est donc simple : si vous possédez un appareil Kindle, fabriqué par Amazon, choisissez l’un des deux formats, MOBI ou ASW. Dans le cas contraire, le format EPUB conviendra à merveille. Enfin, les œuvres du domaine public étant libres, on les trouve généralement exemptes de DRM. Les sites qui les proposent l’affichent non sans fierté.

Le XVIIIe siècle est particulièrement représenté dans cette littérature numérisée. Tout texte passant dans le domaine public septante ans après la mort de son auteur**, les grands textes du siècle des Lumières foisonnent sur la toile. Conscient de cette richesse et des nombreuses possibilités offertes par ces abondantes ressources, l’Institut et Musée Voltaire a collaboré à un projet de recherche avec la Haute École de Gestion de Genève dans le but d’établir un outil de promotion et de diffusion de ces livres numériques libres. De plus amples informations sur ce travail sont présentées dans la section Voltaire nous écrit de ce numéro de la Gazette des Délices.

*Digital Right Management = contrainte liée à l’usage d’un fichier numérique, par exemple en limitant la copie ou imposant un support de lecture.
 
**Loi généralement appliquée en Suisse et dans l’UE, mais qui dépend toujours des règles et des usages des différents pays.



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© IMV Genève | 07.11.2013