La revue électronique de l'Institut et Musée Voltaire
ISSN 1660-7643
       
         
   
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- Eh bien ! À peine ai-je eu le temps d'esquisser un premier article sur L'amour nègre que ce roman (mais s'agit-il bien de cela ?) est dépassé.
- Dépassé ? Mais pourquoi donc ?
- Pourquoi n'est pas la bonne question. Par qui serait plus juste.
- Je n'y comprends rien : expliquez-vous.
- N'avez-vous donc pas entendu parler du nouveau prodige, de la dernière des merveilles, salué jusque dans le vestibule de la Maison de Rousseau et de la Littérature par un conseiller d'État ?
- Mais quel rapport entre Joël Dicker et Jean-Michel Olivier ?
- L'un chasse l'autre : il est à parier que votre correspondante du Figaro, qui se pâmait devant la flèche de Guillaume Tell et aimait tant le roman de Jean-Michel avant de l'avoir lu, connaisse aujourd'hui l'extase à la seule vue du pavé de Joël.
- Je vous trouve bien familier.
- C'est une histoire d'ailes.
- Je ne vous comprends pas.
- Imaginez : un romancier genevois reçoit le prix Interallié : on le fête des bords du lac à ceux de l'Hudson River, et tout le monde en redemande. Quelques mois plus tard, un autre survient, plus jeune, qui manque le prix Goncourt...
- ...mais qui reçoit tout de même celui de l'Académie Française !
- J'allais y venir : que vient donc faire ce jeune homme au regard vif parmi ces vieux messieurs ?
- Vous en avez décidément contre les prix littéraires...
- J'en ai surtout contre cette manie genevoise qui veut qu'on adule tout ce qu'on encense à Paris. Et les Parisiens, pendant ce temps, s'amusent. Quelques caciques font bombance chez Drouant, se demandent à quelle province ils jetteront cette année leur aumône, et abandonnent notre jeune genevois aux griffes d'un érudit corse.
- Mais vous n'aimez pas le roman de Joël Dicker ?
- Je n'ai pas dit cela.
- Jean-Michel Olivier, donc...
- ... a produit, figurez-vous, un nouveau roman !
- Vous êtes donc doublement dépassé : sur votre gauche, par le productif Joël Dicker ; sur votre droite, par Jean-Michel Olivier lui-même. Et quel est le titre de ce nouvel opus ?
- Après l'orgie...
- Hum... Une odeur d'orage...
- Une nouvelle tonalité, en tout cas. La dame Maurisse, qui aime à décoder les identités, à retrouver l'actualité dans les moindres faits et gestes de personnages dont elle oublie qu'ils sont, au même titre que sa fameuse « actu », faits de papier, aurait reconnu dans Papi ce dirigeant italien...
- Ah ! Laissez-moi deviner !
- Inutile : l'essentiel est ailleurs.
- Mais on retrouve Adam, tout de même ?
- À peine.
- Mais qui donc, alors ?
- Ming, sa sœur. Et son psy.
- Il sera donc question...
- De mots.
- De maux ?
- Écrivez-le comme vous voulez.
- Du moi, aussi ? Ou plutôt du « Je » ?
- De jeux, plutôt.
- De jeux de mots ?
- Oui. Et même de calembours qui nous font sortir, nous autres lecteurs, du cadre du récit, dont Jean-Michel Olivier (et il a raison) se moque éperdument.
- Il aime les signifiants...
- Ce sont les stigmates de nos maux...
- De nos mots ?
- Ah, n'abusez pas de ma patience ! Jean-Michel Olivier lui-même a failli abuser de celle du lecteur...
- Comment le savez-vous ?
- En lisant le dernier intertitre du roman : « Un psy soit-il » ou telle métaphore réellement filée : « Excusez-moi. Cette histoire de suaire m'a fait perdre le fil »...
- Des blagues de potache...
- C'est qu'il s'agit, dans ce roman, d'avoir le dernier mot. Ming ou son psy, Adam ou le lecteur, Papi ou ceux qui font de la résistance... Tout est bon, pourvu que le langage soit objet de jouissance.
- De plaisir, voulez-vous dire ?
- Non, de jouissance. La trame n'a plus vraiment d'importance. Ce qui compte, c'est le moment du dire, le verbe à l'état brut, le jeu qu'il entraîne et qui bouscule le réel...
- Mais l'orgie, dans tout ça ?
- Elle est définie : « L'extase matérielle. Le futile et le superflu. La tyrannie du présent. Cette abondance qui nous ravit. Ce luxe qui nous étouffe. »
- Rien de voltairien là-dedans.
- Bien au contraire.
- Et le style ?
- Un dialogue. Un simple dialogue.
- Rien d'autre ?
- Que vouliez-vous de plus ?
- Ah, je ne sais plus...
- Ce n'est rien, cela va vous revenir. Tenez, allongez-vous, là, sur ce divan.
- Pour une orgie, sans doute ?
- Je n'aurais garde. Mais une quête, peut-être, pas si éloignée, finalement, de votre sacro-sainte orgie.
- Une quête ? Vraiment, je ne vois pas.
- La quête de l'origine.
- Encore un jeu de mots !
- Le dernier, rassurez-vous.
- Mais ce divan, donc ?
- Bonsoir.


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© IMV Genève | 29.11.2012