La revue électronique de l'Institut et Musée Voltaire
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Commençons cette rubrique bibliographique par une publication assez exceptionnelle, à savoir le fameux Mémoire de Jean Meslier :  Mémoire des pensées et des sentiments de J[ean] M[eslier] pre[stre] cu[ré] d’Estrep[igny] et de Bal[aize] sur une partie des erreurs et des abus de la conduite du gouvernement des hommes où l’on voit des démonstrations claires et évidentes de la vanité et de la fausseté de toutes les divinités et de toutes les religions du monde, éditions Talus d’approche, Soignies, 2007, 3 volumes, 10,7 x 16,7, texte corrigé et en français moderne (H. Baudry-Kruger, T. Borriello, M. Bourdain, S. Gurnicky ; préface, notes, essai sur la bibliothèque de J. Meslier, bibliographie (1972-2007) (H. Baudry-Kruger) : tome 1 : preuves 1 à 3 ; tome 2 : preuves 4 à 6 ; tome 3 : preuves 7 et 8.

Le regain d’intérêt pour le premier texte ouvertement et systématiquement athée de la littérature européenne se fait particulièrement sentir depuis quelques années. En effet, la tension était un peu retombée après l’époque qui suivit la parution de l’édition, chez Anthropos, des œuvres complètes de Jean Meslier, dont le troisième manuscrit autographe du Mémoire (BN FF 19460) en 1970-1972 par Jean Deprun, Roland Desné et Albert Soboul. Jean Meslier, et ce n’est certainement pas fortuit, est dans l’air du temps, sensible à divers points de vue, qu’il s’agisse de la traduction japonaise du Mémoire par K. Ishikawa et Yoshitoshi Mitsui (2006), du roman de Günter Mager, Das Wissen des Jean Meslier (2006) ou de la pièce de théâtre de David W. Hall et Colin Brewer, représentée en juin 2007 à Londres, The Last Priest, pour ne pas parler des travaux de recherche en cours à travers le monde, tant en histoire, littérature, philosophie que sciences sociales et politiques, ainsi que des traductions complètes d’un texte qui n’a subi, en français comme dans diverses langues, que trop d’anthologisations et saucissonnages mutilateurs.
Depuis de nombreuses années se posait le problème de l’accès au texte. À quoi pouvait donc recourir le curieux ou le chercheur ? La toute première édition du texte de Jean Meslier, mort en 1729, n’avait vu le jour que, en 1864, à Amsterdam, grâce au travail acharné, et aux sous, de Rudolf Charles (d’Ablaing van Giessenburg). Tirée en petit nombre et vite devenue introuvable, Georg Olms Verlag en a imprimé un fac-similé. Depuis 1970, il était plutôt admis que ce texte était peu fiable et, étant donné qu’il s’agissait de l’édition d’une copie de l’un des manuscrits autographes, le texte ne pouvait prétendre à l’originalité. Ainsi, début 2007, les éditions Coda ont publié une version modernisée et allégée, avec le texte et quelques notes, de l’édition de 1970, laquelle, comme le révèlent les principaux sites de livres anciens sur le Web, obéit aux lois de la grande rareté.
Les raisons de publier l’édition hollandaise de 1864 ne manquaient pas. Il s’agit d’un geste fort, vu l’ampleur de ce texte, sa complexité (trois états recopiés de la main de l’auteur, plus des dizaines de copies qui ont tôt circulé à travers l’Europe), les conditions dans lesquelles il a été écrit, diffusé, tu, édité enfin, près de cent cinquante ans plus tard. Il fallait aussi faire le point de la recherche, établir une bibliographie (1972-2007), dans la suite de la première (origines-1972) procurée dans les œuvres complètes, se demander ce que lire Meslier au XXIe siècle pouvait signifier. Enfin, contrairement à une opinion établie depuis une trentaine d’années, le texte édité par Rudolf Charles n’est pas mauvais. Au contraire. Il provient d’une élégante copie du dix-huitième siècle, très lisible, possédée par l’Institut international d’histoire sociale (IISG) d’Amsterdam. Une fois l’imprimé d’origine nettoyé de ses scories, apparaît un texte qui réserve des surprises et, par exemple, se montre plus fiable que le manuscrit lui-même en ce qui concerne plusieurs références. Ce texte fournit donc un instrument permettant un accès maintenant sûr et pratique à la pensée de Jean Meslier. L’éditeur a fait le choix d’une annotation plutôt brève (au total 500 notes pour 1100 pages) qui, sans grever le texte déjà lourd, permette une lecture croisée et exigeante mais aussi agréable. Le format de cette édition, en trois petits volumes à couverture rouge (format 10,7 x 16,7 cm), garantit une lisibilité et une présence sans encombre à qui entreprend ce grand voyage dans la pensée d’un des fondateurs, encore trop méconnu, de la modernité radicale.

Quelques autres publications méritent (ou non) un petit détour :

Alain Rustenholz, Paris, la ville rêvée de Voltaire , Parigramme, Compagnie parisienne du Livre, 2007.
On doit déjà à Alain Rustenholz plusieurs “Paris” dans la même collection Parigramme. Or le choix de Voltaire pour présenter le Paris du dix-huitième siècle est a priori surprenant : le philosophe quitte en effet la capitale en 1752 et n’y revient que vingt-six ans plus tard, en 1778, pour y mourir. Mais Voltaire a connu –insigne avantage- le Paris de la fin du règne de Louis XIV, celui de la Régence, et celui qui, à peu de choses près, sera encore décrit par les hommes de la Révolution. Fort de cet atout, l’auteur parvient à tenir sa promesse. Voltaire était absent ? Soit, mais l’on continue de jouer ses pièces, à commencer par L’Orphelin de la Chine, qui provoque une véritable révolution du costume... et l’on ne cesse de parler de lui, de le jouer, de se jouer de lui, aussi, allant jusqu’à souhaiter, comme certains, qu’il finisse ses jours en exil, au fin fond du pays de Gex.
L’iconographie est très riche et très luxueuse, malgré quelques affirmations hasardeuses : c’est ainsi que l’auteur suit sans l’ombre d’une hésitation, s’agissant du Portrait de Voltaire à l’âge de vingt-quatre ans, l’avis de Michelle Lespes que nous avions nous-mêmes publié dans le n°12 de La Gazette des Délices (hiver 2006) : selon Mme Lespes, on s’en souvient, ce portrait ne serait pas dû à Largillière, mais à J.-A. Aved. Même chose pour le soi-disant portrait de Voltaire attribué à F. De Troy, et où l’on reconnaît bien mal le futur hôte des Délices... De fait, les légendes iconographiques souffrent à plusieurs reprises d’approximations, voire d’inexactitudes. C’est dommage, car les reproductions éclatent en elles-mêmes de mille couleurs.
Un très bel ouvrage, donc, très utile pour la connaissance du Paris des Lumières... avec ou sans Voltaire.
             
Pierre Milza, Voltaire, Paris, Perrin, 2007, 913 p.
Encensées par une critique (volontairement ?) aveugle, les neuf cent treize pages de Pierre Milza apparaissent comme un lointain –et inutile- avatar des cinq volumes biographiques publiés, il y a une quinzaine d’années, par l’équipe de René Pomeau. Mais Voltaire se devait d’avoir de nombreux biographes : à qui le tour ?

 



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© IMV Genève | 08.01.2008